Quel christianisme pour le 21e siècle?
La vie et l'oeuvre d'Alexandre Men nous offrent quelques pistes
Quel christianisme pour le 21e siècle ? Vaste question à laquelle des volumes entiers pourraient être consacrés, bien que la réponse puisse se résumer en une seule phrase : le christianisme de tous les temps est la vie en Christ.
Depuis plus de 2000 ans, le christianisme est fondamentalement le même dans son essence, à savoir la rencontre et la nouvelle alliance de l’Homme avec Dieu en la personne du Christ. Cette rencontre mystique avec la Présence divine est propre à chaque être humain dans sa profondeur et son expression. La beauté et le mystère du christianisme résident peut-être dans le caractère unique de l’union avec l’Un qui se traduit par la multiplicité des visages et des oeuvres des enfants de Dieu.
Ce qui change, d’époque en époque, est la manière dont les êtres vivent et expriment leur foi dans le contexte socioculturel qui leur est propre. Au fil des siècles, l’histoire de l’humanité résulte de la somme des réponses individuelles à l’appel de Dieu.
Enfant du Ciel et de la Terre, le chrétien est habité d’un désir conscient de transcendance et de la Vie du Christ qui lui offre un modèle pour son existence. Dans les profondeurs de son âme brûle la flamme éternelle et divine dont l’immanence n’a de cesse de vouloir affleurer à la surface de son être manifesté dans l’expression unique de ses talents.
Animée par le Souffle de Dieu et guidée par l’Esprit Saint, la Vie en Christ est une dynamique vivante et sans cesse renouvelée. Le christianisme est la réponse créative en pensées, en paroles et en actes, d’une communauté de croyants vivant dans le monde sans être du monde.
Chaque génération de chrétiens est donc confrontée au défi de la fidélité à Dieu dans un univers où tout semble y faire obstacle.
L’univers dans lequel a vécu le père Alexandre Men (1935-1990) et la manière dont il a relevé ce défi me semblent particulièrement intéressants dans le contexte de notre 21e siècle.
Harcelé par le KGB à cause de son influence sur la société et les intellectuels, attaqué par les antisémites en raison de ses origines juives, le père Alexandre Men est mort en martyr, assassiné à coups de hache le 9 septembre 1990. Ce jour-là, l'Eglise orthodoxe russe a perdu l'une de ses figures les plus rayonnantes, le christianisme un génie universel, un prophète ardent et un apôtre courageux.
Recueil de conférences, d'homélies et de lettres, ce livre révèle une théologie en acte, une foi vécue « sous le soleil» autant qu'à la lueur des cierges. Il témoigne d'une spiritualité non seulement ouverte aux autres religions, au dialogue avec l'art et la science, à l'engagement dans la cité, mais aussi profondément enracinée dans la Parole de Dieu et la tradition de l'Église. Centrée sur l'ici et maintenant, la vie en Christ y apparaît comme une « eucharistie cosmique », un mouvement permanent d'écoute, d'éveil, de conversion du cœur, de don de soi, d'abandon à la Providence et de création dans la liberté de l'Esprit saint. Pour le père Alexandre, toutes les divisions conventionnelles entre le sacré et le profane, le monde et l'Église, les croyants et les incroyants, les différentes confessions chrétiennes, doivent être assumées et transcendées dans la lumière et l'unité de la Croix mystère de l'amour et de la résurrection.
- Le christianisme ne fait que commencer. Les éditions du Cerf, 1996.
Ignorant les leçons de son histoire récente, l’Occident se dirige à grands pas vers une version plus technologique et plus sournoise du système totalitaire soviétique qu’a connu Alexandre Men. Comme lui, nous avons à faire à une machine technocratique désirant gérer chaque instant de la vie de populations assimilées à du bétail humain. L’idéal progressiste transhumaniste a remplacé le rêve communiste de l’homo sovieticus, mais le contrôle de l’information, la surveillance de masse, la propagande, la répression de la liberté d’expression et la restriction des droits fondamentaux demeurent les mêmes tactiques.
Dans cette vaste prison à ciel ouvert qu’était l’Union soviétique, et qui peut-être sera notre Occident dans un futur proche, Alexandre Men, profondément investi dans son sacerdoce, a su non seulement partager la Bonne Nouvelle à toutes les classes de la population (gens du peuple, intellectuels, artistes et scientifiques), mais aussi développer un dialogue avec les autres communautés religieuses tout en utilisant avec intelligence les nouveaux moyens de communication progressivement mis à sa disposition.
Autant de qualités que les chrétiens du 21e siècle devraient développer pour échapper aux pièges des clivages et de la polarisation des opinions au sein des différentes dénominations du christianisme et de la société en général.
Enracinement dans la Parole de Dieu, engagement dans la cité, ouverture sur la société, don de soi et création dans la liberté de l’Esprit Saint, la vie d’Alexandre Men est une réelle source d’inspiration afin de pouvoir affirmer comme lui que le christianisme ne fait que commencer et surtout de pouvoir contribuer pleinement à son développement.
Pour explorer la vie et la pensée d’Alexandre Men, je vous invite à consulter les ressources ci-dessous et en particulier un extrait du livre “Le christianisme ne fait que commencer” intitulé "Ce que je crois” et qui commence ainsi :
Le christianisme n'est pas une « idéologie », une doctrine abstraite ou un système figé de rites. La Bonne Nouvelle est entrée dans le monde comme une force dynamique, englobant tous les aspects de la vie, ouverte à tout ce que Dieu a créé dans la nature et dans l'homme. Ce n'est pas seulement une religion qui a existé pendant vingt siècles, mais une voie tournée vers l'avenir.
Pour aller plus loin
Ce que je crois - Traits essentiels d'une conception chrétienne du monde selon la Parole de Dieu et l'expérience de l'Église. “Le christianisme ne fait que commencer” par Alexandre Men. Les éditions du Cerf, 1996. (p. 37- 42)
Alexandre Men, un prêtre de l’Église orthodoxe russe en dialogue avec la société - Yves Hamant, desk russie
Alexandre Men, l’ouverture au Christ - Nicolas Senèze, La Croix
J'AIME! à approx 20 min dans la vidéo, une citation de Men: "L'image de la ressemblance du Créateur dans l'Homme, c'est son intelligence, sa conscience, sa créativité. Priver l'Homme d'intelligence, c'est faire de lui une bête; priver l'Homme de conscience, c'est le transformer en machine. La machine a son intelligence, mais elle n'a pas de conscience. Priver l'Homme de la possibilité de créer, c'est le priver d'un trait extrêmement important de la ressemblance de Dieu, car il est écrit dans la Bible: "créons l'Homme à notre image, à notre ressemblance" - c'est le Créateur qui affirme cela. Tant que nous respirons, nous devons créer."
Créons, donc, cette vie inspirée et dynamique qui nous ressemble plus que la vie technocratique qui s'emmène avec ses gros sabots!
2ème paragraphe : "l'union avec l'Un" attention ça peut prêter à confusion ! le christianisme n'est pas un monisme; il est dualiste = il y a Dieu et sa Création ; c'est ce qui le distingue notamment de tous les cultes précédents ; par ailleurs, Dieu est Trinitaire ce sur quoi l'Orthodoxie orientale insiste beaucoup et a beaucoup travaillé ! mais il est vrai que la Christ en est la personne la plus accessible ; la prière que le Christ nous a transmis, qui est la sienne, est adressé à son Père première personne de la Trinité. Le signe de croix est le moyen le plus puissant (au sens énergétique subtile) de nous relier en conscience à la Trinité.
une personne qui mériterait d'être canonisée ; Je vais mettre se livre dans ma liste de lecture ! merci !